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L’ENQUÊTE DE PELLIEUX


tre de détails nouveaux (retrouvés subitement dans la mémoire de ces officiers qui se suggestionnent les uns les autres), et, encore, s’exagérer des inventions de la presse, et devenir ainsi, à force d’être répétées, des faits acquis, Henry les a, de longue date, préparées. Non pas d’un seul coup, mais au jour le jour, profitant de cent menus faits qu’il a recueillis, toujours en éveil, dénaturés et signalés à Gonse, tantôt avec la collaboration presque inconsciente de Lauth et de Gribelin, tantôt avec celle de ses faussaires habituels, Lemercier-Picard et Guénée.

Premier chef d’accusation :

Picquart a communiqué à l’avocat Leblois le dossier secret du procès Dreyfus et, notamment, la pièce Canaille de D… « Un jour qu’Henry est entré brusquement dans le bureau », il les a vus ensemble qui compulsaient le dossier, ouvert devant eux, et d’où sortait la photographie de la pièce secrète. Il précise la date : en octobre 1896, et que la pièce était près du coude du colonel. (Leblois, en octobre, n’était pas à Paris.) « Mon opinion, dit Henry à Pellieux, c’est que cette pièce (le document libérateur) n’a pu sortir du ministère que par la faute ou la négligence de Picquart. »

Dès lors, tout s’enchaîne et s’explique : Picquart, par Leblois, a renseigné Scheurer et les Dreyfus ; il a emporté chez lui l’une des photographies de la pièce secrète ; une femme la lui a volée et l’a remise à Esterhazy.

Ainsi, Henry, après Billot, authentique le roman de la dame voilée. Le hasard, qui l’a fait entrer « brusquement » chez Picquart, lui a permis d’assister à la genèse de la félonie.

À l’appui de ces dires (à supposer qu’ils en aient be-