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LA CHUTE DE MÉLINE


François Zola, après ce drame douloureux, toute de labeur et d’énergie, où il fut honoré de l’amitié de Thiers et de Mignet, son projet pour les fortifications de Paris, qui est d’un précurseur[1], ses travaux au port de Marseille, le canal d’Aix, son œuvre qui porte son nom[2]. Rien que le souvenir de son propre père eût dû l’arrêter, l’empêcher de violer cette tombe.

La chose horrible, beaucoup plus que l’action si basse d’inviter les gens de l’État-Major à déshonorer le père dans son cercueil et le fils dans son père[3], c’est que Loverdo, en leur envoyant sa dénonciation, crut rendre un suprême service à l’armée. « la venger d’un traître[4] ».

Les dossiers du personnel, conservés aux archives de la Guerre, sont tenus pour secrets ; « constitués uniquement en vue des besoins administratifs[5] », ils dorment dans la poussière d’une véritable nécropole. À peine si quelques historiens obtiennent parfois le privilège de les consulter. Mais toute arme, en ces tristes temps, était bonne. Billot ayant donné l’ordre de rechercher le dossier de François Zola, l’archiviste le remit à un envoyé d’Henry[6].

  1. Il y préconisait l’emploi des forts détachés qui fut adopté après la guerre de 1870.
  2. Le canal Zola fut déclaré d’utilité publique le 2 mai 1844 ; Thiers s’y était vivement intéressé.
  3. Zola, à la mort de son père (1847), avait sept ans ; il assista à ses obsèques « auxquelles toute la population participa ». (La Vérité en marche. 238.)
  4. La Vérité en marche, 233.
  5. Lettre de Cavaignac, ministre de la Guerre, au garde des Sceaux, du 29 août 1898. (Instruction Flory.)
  6. Déclarations de Raveret, chef, et d’Hennet, sous-chef des archives administratives de la guerre, à Zola (La Vérité en marche, 253 et 277). — L’envoyé d’Henry fut, sans doute, Gribelin. — La remise du dossier à Henry eut lieu dans le courant de mars 1898. Dès le mois suivant, un article de la Patrie, du 29 avril, fait allusion à l’affaire d’Alger, aux archives de la Guerre qui renferment des renseignements édifiants « sur plusieurs