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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


bération prise par eux en assemblée générale[1] ». Ainsi, le ministre de la Guerre s’étant substitué arbitrairement au conseil de guerre, toute la procédure était nulle.

Le rapporteur Chambareaud, puis le procureur général Manau écartèrent les six premiers moyens[2]. Légal ou non, les avocats de Zola avaient accepté l’arrêt réglementaire au lieu de se pourvoir aussitôt

  1. Procès Zola, II, 438 à 451.
  2. Chambareaud repousse le moyen relatif au refus de poser des questions à Mme Dreyfus et à Casimir Perier sur la bonne foi de Zola ; l’arrêt de la Cour, en l’espèce, est l’application pure et simple de l’arrêt réglementaire (II, 462). C’est également l’avis de Manau (II, 488). — Sur le moyen relatif à la violation des art. 319 et 335 du code d’instruction criminelle. « en ce que la Cour d’assises, après avoir laissé déposer un témoin (Pellieux), sur des faits dont elle-même interdit la preuve, et après avoir fait appeler un autre témoin (Boisdeffre) pour confirmer la déposition sur le même fait, a, par arrêt du 18 février, refusé la parole à la défense pour discuter la déposition de ces témoins contradictoirement avec eux », Chambareaud s’en remet à l’appréciation de la Chambre criminelle, sans se prononcer (462). Au contraire, Manau repousse nettement le moyen, en invoquant l’arrêt réglementaire. Sans doute Boisdeffre l’a enfreint : mais Demange, lui aussi, avait fait une déclaration abusive (491). — Sur l’audition de deux témoins (Mme de Boulancy et Mlle de Comminges) par commission rogatoire, « sans prestation préalable du serment exigé par l’art. 317 », Chambareaud est hésitant (467) ; Manau rejette par cet argument : « Sous l’empire de la compétence correctionnelle, les délits de presse étaient poursuivis sur la déclaration des témoins ne prêtant que le serment réduit ; pourquoi en serait-il autrement aujourd’hui devant le jury ? » (499.) — Sur le refus de l’apport des procédures Dreyfus et Esterhazy, Mornard soutenait que la cour avait empiété sur le pouvoir discrétionnaire du président. Chambareaud rappelle que la défense elle-même a eu le tort de s’adresser à la Cour (463) ; Manau dit également que le moyen manque en fait et en droit (493). — Sur le refus d’interroger les experts qui auraient invoqué à tort le secret professionnel. Chambareaud (464) et Manau (493) répondent que les experts pouvaient l’invoquer et que, d’ailleurs, au procès Esterhazy, ils avaient déposé à huis clos.