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LE JURY


prises avec Meyer qui le couvrit de ridicule[1].

Le lendemain, la machine, surchauffée, éclata[2].

VIII

Picquart commença sa nouvelle déposition par cette simple phrase : « Autant j’obéirai toujours aux ordres de mes chefs chaque fois que je les recevrai, autant je me crois obligé, quand il s’agit d’une question d’appréciation, de dire tout ce que je pense[3]… » Il s’appliqua ensuite à montrer qu’Esterhazy avait eu très aisément, de ses camarades et sur les champs de tir, dans les écoles à feu qu’il fréquentait, tous les renseignements, d’ailleurs de peu d’intérêt, qui sont énumérés au bordereau.

Pellieux et Gonse furent alors appelés à la barre pour être confrontés avec lui. Le premier, d’une voix tranchante, où montait la colère, maintint sa déposition de la veille, mais sans répondre à aucune objection que sur un point, le seul où Picquart se trompait :

Il est parfaitement exact, dit-il, qu’Esterhazy a été aux manœuvres de cadre et aux écoles à feu ; mais je dis que la note sur Madagascar, dont le travail n’a été élaboré qu’au mois d’août au ministère de la Guerre, n’a pu être

  1. Procès Zola, II, 51 à 62. — Bataille, 285 : « C’est la joie. Président, assesseurs, jurés, avocats, tout le monde se roule. »
  2. Les officiers étaient exaspérés contre Paul Meyer. L’un d’eux s’écria « qu’il irait lui casser la gueule ». Une femme entendit le propos : « Est-ce un officier qui parle ainsi ? — Taisons-nous, dit le militaire à son camarade, il y a ici des mouchards. » (Notes de Monod). — Cela peint l’état des esprits.
  3. Procès Zola, II, 101, Picquart.