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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

1° Qu’il était absurde de prétendre que les fac-similés ressemblaient à des faux ou, comme le répétaient les journaux, que ce fussent des faux[1] ; il peut se produire, du fait de l’impression ou du clichage, quelque différence dans l’épaisseur des traits ; mais l’allure générale de l’écriture ne peut être changée ; les lettres caractéristiques (le double s) ne peuvent être interverties[2].

2° Que l’écriture du bordereau est identique à celle d’Esterhazy[3] ; tous les idiotismes, toutes les formes

  1. Procès Zola, I, 499, Paul Meyer, membre de l’Institut, directeur de l’École des Chartes ; I, 507, Auguste Molinier, professeur à l’École des Chartes ; I, 541, Havet, membre de l’Institut, professeur au Collège de France ; II, 92, Giry, membre de l’Institut, professeur à l’École des Chartes et à l’École des Hautes Études. — De même, Crépieux-Jamin (I, 495) et Teyssonnières (I, 492). — Un groupe d’archivistes paléographes, Lasteyrie, député, A. de Barthélémy, Delaborde. Funck-Brentano, Loth, etc., protestèrent, par une lettre publique, « qu’il était indispensable de recourir aux originaux… On prétendait tirer des conclusions de reproductions dont on n’a pu contrôler la sincérité et qui sont trop grossières pour qu’on y puisse trouver les éléments indispensables pour se faire une opinion raisonnée. » (Éclair du 21 février. — Paul Meyer, Giry et Auguste Molinier ripostèrent qu’ils regrettaient, sans doute, de n’avoir pas à leur disposition l’original du bordereau. « Mais M. de Lasteyrie sait comme nous que l’existence des originaux est un fait exceptionnel et que la critique n’est pas désarmée par leur absence. » Ils rappelèrent le travail de Julien Havet sur les lettres de Gerbert (Sylvestre II) dont les originaux avaient depuis longtemps disparu ; nul ne contesta les découvertes d’Havet qui avait pu reconstituer et interpréter, sur de médiocres dessins du xviie siècle, cette écriture chiffrée du xe. — Gaston Paris déclara que Meyer, Giry et Molinier avaient procédé « avec toute la prudence, la circonspection et la méthode qu’on pouvait attendre d’eux… Meyer, c’est le critique par excellence ; on ne peut lui reprocher que d’être trop difficile en fait de preuves. » (Temps du 24 février.)
  2. Procès Zola, I, 514, Émile Molinier, archiviste paléographe, conservateur au musée du Louvre.
  3. Ibid., I, 500, Paul Meyer ; 541, Havet : II, 94, Giry ; II, 100, Héricourt, chef adjoint du laboratoire de physiologie à la Faculté de Médecine.