Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 3.djvu/407

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE VII

LE JURY

I

Les coups de théâtre, se succédant sans interruption, entretenaient dans les esprits une émotion intense. Il n’y avait pas de scène qui valût ces magnifiques tréteaux des assises ; les passions, dans une telle fermentation, s’avivaient jusqu’à la folie.

Ce fait divers, s’élargissant tous les jours, devenait le champ clos où les idées du passé et celles de l’avenir allaient livrer une de leurs grandes batailles. On put lire dans un journal russe : « C’est l’affaire de la vieille et de la nouvelle France[1]. »

La grande majorité de la nation se refusait toujours à accepter que les généraux eussent commis ce crime : laisser sciemment un innocent au bagne. Il lui était toujours plus facile de croire à la culpabilité d’un seul, du juif, qu’à celle des chefs du Gouvernement et de l’armée.

  1. Sibérie du 23 février 1898.


26