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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


M. Scheurer-Kestner et M. Joseph Reinach fussent de nos amis. »

Il mêle, avec une infinie habileté, aux apologies inattendues des critiques judicieuses :

Pourquoi le Ministre de la Guerre n’a-t-il pas infligé plus tôt, aux détracteurs du général de Boisdeffre, le démenti et le désaveu que le comte de Mun vient seulement de lui arracher ?… Vous nous disiez tout à l’heure : Qu’auriez-vous fait à notre place ? Nous n’aurions pas permis qu’on formulât pendant quinze jours, sans les relever, ces attaques contre les chefs de l’armée… Quand M. Scheurer-Kestner vous a porté son dossier, pourquoi n’avez-vous pas fait instruire, comme vous le deviez, cette demande en revision ? Il fallait prendre position honnêtement et légalement. Mais vous n’avez eu le courage de prendre ni une attitude, ni une autre, et vous vous êtes traînés derrière tous les événements et toutes les influences.

Et pourquoi ces tergiversations, cette équivoque attitude ? « La réponse, elle est dans les noms même de ceux que j’appelais et que j’appelle encore vos amis et qui ont commencé la campagne ; elle est dans le nom de celui qui, ici, mène cette campagne, alors que, au lieu d’essayer de réhabiliter un nouveau Calas, il aurait, peut-être, dans sa famille, d’autres réhabilitations à poursuivre[1]. »

Pendant que la gauche et l’extrême gauche éclataient en applaudissements, je répliquai : « Je fais ce que

  1. « Applaudissements vifs et répétés à l’extrême gauche et sur plusieurs bancs à gauche. — Bruits au centre. » — Plus tard, dans la séance du 18 décembre 1900, au cours du débat sur l’amnistie, Méline rappela ces paroles à Millerand, qui répliqua : « Il est exact que je ne me suis déclaré partisan de la revision que le lendemain du jour où a été connu le faux Henry. Ce jour-là, j’ai dû reconnaître que mon ami Jaurès, pour