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L’ENQUÊTE DE PELLIEUX


de l’individu. Billot ayant décliné, dans une note officielle, toute responsabilité de l’incident, les tribunes des deux Chambres restèrent muettes. Il ne s’agissait pourtant pas d’un pauvre hère quelconque, mais d’un colonel. On aurait su que la perquisition chez Picquart avait été réclamée, ordonnée par Esterhazy, on ne se serait incliné que plus bas. Les locataires, chez qui la police s’était introduite sous un prétexte mensonger, furent sollicités de déposer une plainte[1] ; ils s’y refusèrent, s’estimant heureux d’en être quittes pour la peur. Le sabre, ne sentant nulle résistance, enfonça plus avant.

VIII

Pellieux, cette expérience faite, poussa vivement son enquête.

Il commença par entendre à nouveau Mathieu Dreyfus, qui s’étonna de le trouver sec et tranchant, Esterhazy et Scheurer[2]. Comme Scheurer entrait chez Pellieux, Esterhazy sortait ; le général parla durement à l’espion ; puis, s’adressant à Scheurer : « C’est lui. »

La première fois qu’Esterhazy avait raconté son roman à Pellieux, il lui avait indiqué les lieux de ses rendez-vous avec la dame voilée : à l’Esplanade des Invalides, derrière la palissade du pont Alexandre III, au parc Montsouris, à l’endroit même où il s’était rencontré avec

  1. Je fis faire une démarche, à cet effet, chez l’une de ces locataires ; elle supplia qu’on la laissât tranquille.
  2. 23 et 24 novembre 1897.
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