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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


fils, par une longue série de soldats et de diplomates, à la conquête des grands domaines et des grandes charges.

De bonne heure, ils se tournèrent vers l’Autriche. Ils avaient cédé d’abord au courant, national autant que religieux, qui emporta la Hongrie vers la Réforme. Brusquement, avec le palatin Nicolas, ils revinrent à l’Église catholique, et, du même coup, se donnèrent à la maison de Habsbourg, lui donnèrent la Hongrie.

Leur grand homme, le palatin Paul[1], qui, par deux fois, à Saint-Gothard et sous Vienne, aida à sauver l’Empire, est le vrai fondateur de l’Autriche moderne. Il n’y avait pas alors de peuple qui fût plus attaché que les Hongrois à la liberté ; ils l’incarnaient dans la monarchie élective. Par haine de l’Allemand, ils en vinrent à appeler le Turc. Le Palatin écrasa les révoltés, reprit Bude, et fit proclamer, par la Diète, l’hérédité de la couronne dans la descendance mâle des Habsbourg.

L’Autriche récompensa royalement Esterhazy. Déjà baron de Galantha et comte de Forchstenstein, elle le fit prince du Saint-Empire[2], avec droit de frapper monnaie à son effigie, de conférer la noblesse et d’entrer à Vienne avec une garde d’honneur, chevalier de la Toison d’or, ban de Croatie et de Slavonie, vice-roi de Hongrie. Comme les princes régnants, les Esterhazy ajoutent des numéros à leurs prénoms. Des provinces entières leur appartiennent, le plus immense majorat

  1. 1635-1713.
  2. Le Palatin reçut son titre deux jours avant le couronnement de l’archiduc Joseph (7-9 décembre 1687). — « On acheta Esterhazy le Palatin, en lui promettant la dignité de prince. » (Mémoires de Rakoczy, 118, à la suite de l’Histoire des Révolutions de Hongrie, La Haye, 1739.)