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causes réservées aux primiciers et conservateurs, la juridiction de ces magistrats était d’ailleurs privative et non cumulative, sauf les droits de l’ordinaire pour ce qui concernait les mœurs. Les appels devaient être portés devant l’auditeur général et non devant le vice-légat, sauf en cas de suspicion légitime. Enfin les causes fiscales et autres non prévues intéressant les membres de l’Université étaient remises aux tribunaux ordinaires[1].

Telle fut la bulle de Benoît XIV, d’octobre 1745, qui mit fin à des conflits séculaires. L’Université qui avait toujours soutenu avec une infatigable âpreté les droits de ses justiciables[2] pouvait s’en montrer satisfaite. Malgré des réserves et des restrictions qu’explique le progrès des idées en matière judiciaire et qui étaient, comme on dit, un signe des temps, elle n’en formait pas moins une sorte d’État dans l’État, investi d’une rare autonomie et capable de dispenser à ses justiciables ces trésors d’indulgence que les corps privilégiés prodiguèrent tant de fois à leurs membres, même indisciplinés et coupables.

Toute corporation revêtait encore, au xviiie siècle, un certain caractère religieux ; à plus forte raison les corporations enseignantes, qui comptaient dans leur sein bon nombre d’ecclésiastiques et où les pratiques religieuses se mêlaient si intimement au culte de la science. Là le nom d’un patron vénéré, des messes, des processions aux divers anniversaires, des services funèbres pour les membres décédés avaient leur place tout indiquée, bien plus encore que dans la vie des corps de métiers. Les gradués de l’Université d’Avignon, docteurs

  1. Bulle de Benoît XIV du 19 oct. 1745. Laval, 72.
  2. Voir notamment les délib. du Coll. des docteurs des 23 fév. 1623, 7 mars et 30 août 1659, 21 févr. 1671, etc. A. V. D. 29, fo 81. D. 30, fos 115, 126 et 240. Un docteur ayant été incarcéré, sur la plainte d’un nommé Dona, marchand de la ville, en 1623, celui-ci dut venir faire des excuses à genoux devant le Collège. (A. V. D 29, fo 61.)