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comme plus courte, la Méthode des dernières raisons des quantités évanouissantes, et c’est aux principes de cette Méthode que se réduisent en dernière analyse les démonstrations relatives à celle des fluxions. Mais cette Méthode a, comme celle des limites dont nous avons parlé plus haut, et qui n’en est proprement que la traduction algébrique, le grand inconvénient de considérer les quantités dans l’état où elles cessent, pour ainsi dire, d’être quantités, car, quoiqu’on conçoive toujours bien le rapport de deux quantités tant qu’elles demeurent finies, ce rapport n’offre plus à l’esprit une idée claire et précise aussitôt que ses termes deviennent l’un et l’autre nuls à la fois.

C’est pour prévenir ces difficultés qu’un habile géomètre anglais, qui a fait dans l’Analyse des découvertes importantes, a proposé dans ces derniers temps de substituer à la Méthode des fluxions, jusqu’alors suivie scrupuleusement par tous les géomètres anglais, une autre Méthode purement analytique, et analogue à la Méthode différentielle, mais dans laquelle, au lieu de n’employer que les différences infiniment petites ou nulles des quantités variables, on emploie d’abord des valeurs différentes de ces quantités, qu’on égale ensuite, après avoir fait disparaître par la division le facteur que cette égalité rendrait nul. Par ce moyen, on évitez-la vérité les infiniment petits et les quantités évanouissantes ; mais les procédés et les applications du calcul sont embarrassants et peu naturels, et l’on doit convenir que cette manière de rendre le Calcul différentiel plus rigoureux dans ses principes lui fait perdre ses principaux avantages, la simplicité de la méthode et la facilité des opérations. (Voir l’Ouvrage intitulé The residual Analysis a new branch of the algebric art, by John Landen, London, 1764, ainsi que le Discours publié par le même Auteur, en 1758, sur le même objet.)

Ces variations dans la manière d’établir et de présenter les principes du Calcul différentiel, et même dans la dénomination de ce Calcul, montrent, ce me semble, qu’on n’en avait pas saisi la véritable théorie, quoiqu’on eût trouvé d’abord les règles les plus simples et les plus commodes pour le mécani\sine des opérations.