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DE LAGRANGE AVEC D’ALEMBERT

110.

D’ALEMBERT À LAGRANGE.

À Paris, ce 20 novembre 1772.

Mon cher et illustre ami, j’ai communiqué à M. Cassini, le fils, qui ne fait que d’arriver de la campagne, l’endroit très-obligeant de votre dernière Lettre qui le concerne, et il m’a chargé de vous en faire ses très-humbles remercîments. Votre approbation l’encourage autant qu’elle le flatte ; c’est un jeune homme plein d’ardeur et de bonne volonté.

Est-il bien vrai que vous ne soyez pas tout à fait mécontent des rogatons imprimés que je vous ai envoyés ? Je le souhaite plus que je ne l’espère, tant je me sens au-dessous du peu que j’ai été jadis. Ma tête devient de jour en jour plus incapable des recherches mathématiques ; des insomnies presque continuelles m’interdisent toute espèce d’application, et vous devez juger qu’il me reste bien peu de capacité à cet égard, puisque je n’ai point encore pu lire vos derniers Mémoires, auxquels je donnerai les premiers moments tant soit peu lucides que j’aurai. J’espère que la fin de mes rogatons sera imprimée dans deux mois au plus tard, et je ne tarderai pas alors à vous l’envoyer. En attendant, je vous invite fort à poursuivre ce que vous avez fait sur la figure de la Terre, ne doutant pas que vous n’alliez sur cela beaucoup plus loin que moi. Je voudrais bien aussi que tous les Mémoires dont vous me parlez fussent imprimés, et le fussent bientôt. Si vous le vouliez, j’en pourrais parler à Briasson, qui peut-être s’en chargerait ; mais je ne ferai rien, comme de raison, sans savoir si cela vous convient. Je tâcherai aussi de hâter l’impression des pièces couronnées depuis 1763, et il ne tiendra pas à moi qu’elles ne paraissent, comme vous le désirez. J’ai écrit à Bruyset ; je n’en ai point encore eu de réponse ; peut-être vous la fera-t-il à vous-même ; j’espère qu’en conséquence de ma Lettre il hâtera l’impression de vos remarques sur l’Algèbre d’Euler.