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MÉCANIQUE ANALYTIQUE

laquelle il pourrait remonter à la même hauteur. Ainsi le principe de Huygens se réduit à ce que, dans le mouvement des corps pesants, la somme des produits des masses par les carrés des vitesses à chaque instant est la même, soit que les corps se meuvent conjointement d’une manière quelconque, ou qu’ils parcourent librement les mêmes hauteurs verticales. C’est aussi ce que Huygens lui-même a remarqué en peu de mots, dans un petit Écrit relatif aux méthodes de Jacques Bernoulli et de L’Hôpital pour les centres d’oscillation.

Jusque-là ce principe n’avait été regardé que comme un simple théorème de Mécanique ; mais, lorsque Jean Bernoulli eut adopté la distinction établie par Leibnitz entre les forces mortes ou pressions qui. agissent sans mouvement actuel et les forces vives qui accompagnent ce mouvement, ainsi que la mesure de ces dernières par les produits des masses et des carrés des vitesses, il ne vit plus dans le principe en question qu’une conséquence de la théorie des forces vives et une loi générale de la nature, suivant laquelle la somme des forces vives de plusieurs corps se conserve la même, pendant que ces corps agissent les uns sur les autres par de simples pressions, et est constamment égale à la simple force vive qui résulte de l’action des forces actuelles qui meuvent les corps. Il donna ainsi à ce principe le nom de conservation des forces vives, et il s’en servit avec succès pour résoudre quelques problèmes qui n’avaient pas encore été résolus et dont il paraissait difficile de venir à bout par des méthodes directes.

Daniel Bernoulli a donné ensuite plus d’extension à ce principe et il en a déduit les lois du mouvement des fluides dans des vases, matière qui n’avait été traitée avant lui que d’une manière vague et arbitraire. Enfin il l’a rendu très général, dans les Mémoires de Berlin pour l’année 1748, en faisant voir comment on peut l’appliquer au mouvement des corps animés par des attractions mutuelles quelconques ou attirés vers des centres fixes par des forces proportionnelles à quelques fonctions des distances que ce soit.

Le grand avantage de ce principe est de fournir immédiatement une équation finie entre les vitesses des corps et les variables qui déter-