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SECONDE PARTIE. — SECTION I.

et dont la direction soit la même que celle de cette vitesse. Ce produit de la masse d’un corps multipliée par sa vitesse s’appelle communément la quantité de mouvement de ce corps, parce qu’en effet c’est la somme des mouvements de toutes les parties matérielles du corps. Ainsi les forces se mesurent par les quantités de mouvement qu’elles sont capables de produire, et réciproquement la quantité de mouvement d’un corps est la mesure de la force que le corps est capable d’exercer contre un obstacle, et qui s’appelle la percussion. D’où il s’ensuit que, si deux corps non élastiques viennent à se choquer directementen sens contraire avec des quantités de mouvement égales, leurs forces doivent se contre-balancer et se détruire, par conséquent les corps doivent s’arrêter et demeurer en repos. Mais, si le choc se faisait par le moyen d’un levier, il faudrait, pour la destruction du mouvement des corps, que leurs forces suivissent la loi connue de l’équilibre du levier.

Il paraît que Descartes a aperçu le premier le principe que nous venons d’exposer ; mais il s’est trompé dans son application au choc des corps, pour avoir cru que la même quantité de mouvement absolu devait toujours se conserver[1].

Wallis est proprement le premier qui ait eu une idée nette de ce principe et qui s’en soit servi avec succès pour découvrir les lois de la communication du mouvement dans le choc des corps durs ou élastiques, comme on le voit dans les Transactions philosophiques de 1669 et dans la troisième Partie de son Traité de Motu, imprimé en 1671.

De même que le produit de la masse et de la vitesse exprime la force finie d’un corps en mouvement, ainsi le produit de la masse et de la

  1. Dans aucun des nombreux écrits de Descartes, on ne trouve un énoncé net et compréhensible du principe. Quant aux applications, les erreurs qu’il commet sont bien plus graves que ne semble l’indiquer ici Lagrange. Il affirme, entre autres propositions erronées, qu’un corps qui en choque un autre ne peut lui imprimer de mouvement que s’il a une masse plus grande que la sienne ; dans tout autre cas, le corps choquant sera réfléchi, et le corps choqué ne bougera pas. (Édition de M. Cousin, t. IX, p. 195.) (J. Bertrand.)