CHAPITRE VIII
Réflexion sur le temps de la conversion d’un peuple.
Lorsque des missionnaires, revêtus d’une mission légitime, se dévouent pour aller porter la parole du salut à une nation lointaine, si malgré leur courage et leurs efforts, ils ne parviennent jamais à arriver et que des causes tout à fait indépendantes de leur volonté leur ferment toute voie de parvenir jusqu’à elle, il faut conclure que, pour ce peuple, le temps de la conversion n’est pas encore venu ; car le Père de famille lui-même ne permet pas aux ouvriers d’arriver jusqu’à la moisson.
Mais si les missionnaires parviennent à arriver, il est indubitable que Dieu veut la conversion de ce peuple ; la moisson est prête ; les moyens sont entre les mains des ouvriers ; et si l’œuvre n’avance pas, ce n’est point sur la Providence ou sur la perversité trop profonde de la nation qu’il faudra en rejeter la faute, mais les missionnaires devront le plus souvent se l’imputer à eux-mêmes.
S’ils négligent l’étude de la langue, étude qui renferme aussi celle des mœurs de la nation et des superstitions qui y règnent, ils ne pourront jamais remplir le devoir de la prédication ; ils ressemblent au laboureur qui retiendrait la semence dans le grenier ; la stérilité de leur ministère ne pourra être imputée qu’à eux-mêmes.
Si ces mêmes missionnaires, aveuglés par l’orgueil national ou par quelqu’autre vain motif, négligent l’institution d’un clergé indigène, les oiseaux du ciel détruiront la semence, les épines étoufferont la moisson, les portes de l’enfer prévaudront contre ce poste avancé de l’Église militante ; mais la faute en sera à ceux qui n’y établirent point de gardiens.
Si des missionnaires, possédés d’une inexplicable inquiétude, détournent leur vue et leur attention du lieu où le Père