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depuis le ixe siècle et qu’elle était terminée au début du xiie. Seulement, dans l’écriture, l s’est maintenue alors qu’elle était déjà vocalisée.

R

R se maintient à l’initiale. Intervocalique également. Mais les cas de dissimilation de r en l ne sont pas rares.


Ex. :

  • peregrinum > pélerin ;
  • *paraveredum > palefroi ;
  • *frigorosum > frireux, frileux.


Cf. encore : germ. heribergam > alberge, auberge.


R intervocalique a une tendance à passer à z : au xvie siècle les dames parisiennes prononçaient pèze, mèze pour père, mère. Cf. Clément Marot, Épitre au biau fils de Pazy. C’est ainsi que s’expliquent les formes actuelles besicles (pour bericles) et surtout chaise pour chaire < cathedram.


Groupes br, pr : r devient quelquefois l par dissimilation.


Ex. :

  • cribrum > crible ;
  • Cristophorum > Cristofle ;
  • tempora > temple (auj. la tempe).


Fr se dissimile en fl dans fragrare > flairer.


R finale s’est amuïe dans les infinitifs en -er et dans les mots en -er, -ier (boucher, premier), excepté dans les monosyllabes : pair, cher, hier, fier. Elle a dû sonner régulièrement jusqu’au xvie siècle et on sait que les rimes mer : aimer, appelées rimes normandes, ne sont pas rares chez Corneille.

R est aussi sujette à la métathèse. Ex. : *berbicem > brebis[1]; *formaticum > fromage ; torculum, troculum >

  1. Berbis dans de nombreux dialectes.