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Ex. :

  • ǫculum > ueil (d’où œil) ;
  • germ. urgǫlī > orgueil ;
  • *fǫliam > fueille (feuille) ;
  • sǫlium > seuil ;
  • trǫculum (pour torculum) > trueil, treuil.


Fǫcum, jǫcum, lǫcum donnent feu, jeu, lieu, par suite de transformations nombreuses et délicates dont le tableau suivant présentera une idée sommaire[1].

fǫcum > *fuou > fueu > feu ;
jǫcum > *juou > jueu > jeu ;
lǫcum > *luou > lueu — lüeu > lieu.

O ouvert tonique libre devant nasale donne uo, ue.

Ex. : hǫmo > uem, plus tard an, l’an (= on, l’on) ; cǫmes > cuens ; bǫna > buona[2] ; sǫnant > suenent ; tǫnant > tuenent (on trouve aussi ces deux dernières formes sans diphtongaison, à cause de l’influence des formes verbales accentuées sur la terminaison, dans lesquelles la diphtongaison n’a pas lieu : sonóns, tonóns).

Plusieurs mots, pour des raisons diverses, dont la principale est, en général, qu’ils sont des mots d’emprunt ou des mots savants, ne présentent pas de diphtongaison. Les plus importants sont : école (< schǫ́lam), rose (< rǫ́sam), rossignol (< *lusciniǫ́lum).


O ouvert entravé devant les consonnes non nasales reste ǫ.

Ex. : pǫrtam > porte ; fǫssam > fosse ; cǫrpus > corps ; pǫrcum > porc ; dǫrmit > dort, etc.

Dans les cas où l’entrave était d’origine romane, la

  1. Ce sont des triphtongues provenant de la diphtongaison de ó en uo, ue et du maintien de u devenu final, m finale ne sonnant plus en latin vulgaire. La différence de traitement entre feu, jeu et lieu (à la place de leu) s’explique sans doute par l’action des consonnes initiales.
  2. Cf. le début de la Cantilène de Sainte Eulalie : Buona pulcela fut Eulalia.