Page:Joseph Anglade - Grammaire élémentaire de l'ancien français.djvu/272

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Buona pulcela fut Eulalia ;
Bels avret cors, bellezour anima ;
Voldrent la veintre li Deo inimi.

Bonne jeune fille fut Eulalie — Beau elle eut le corps, plus belle l’âme — Voulurent la vaincre les Dieu-ennemis.

La liberté dans l’ordre des mots n’est pas d’ailleurs le pur arbitraire : souvent l’ordre pathétique l’emporte sur l’ordre dit logique, comme il arrive dans les langues qui n’ont pas encore fixé par des règles trop rigoureuses l’ordre de leurs éléments. Nous ne pouvons donner ici que quelques indications sommaires, le sujet étant trop vaste et les « règles » n’étant pas nettement établies.

Plus que dans la syntaxe proprement dite il y a dans ce domaine des usages, tendances ou habitudes plutôt que des règles.

Place des substantifs sujets et compléments.

Grâce à la distinction du cas-sujet et du cas-régime, il n’est pas rare de rencontrer le régime direct avant le verbe et le sujet après, ou bien le régime en même temps que le sujet devant le verbe, ou d’autres combinaisons.

Le régime indirect pouvait aussi précéder le sujet et le verbe, et ce sans préposition, comme on l’a vu plus haut. Voici quelques exemples de ces combinaisons, mais elles sont beaucoup plus nombreuses.

Ex. :

Halt sont li pui et molt halt sont li arbre. (Roi., 2271.)
Les puys sont hauts et très hauts sont les arbres.
Ço sent Rollanz la veüe at perdue...
Croist li aciers... et dist li quens. (Rol., 2297.)
Roland sent qu’il a perdu la vue... l’acier grince... le comte dit.