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ACTE TROISIÈME.

cessité, je suis forcé d’acheter mon pain quotidien par un esprit humble. Il est vrai aussi qu’il me faut filer mes pauvres habits par ma seule industrie, au moyen de la souplesse de mon caractère, puisque je n’ai pas eu, en naissant, une fortune indépendante ; mais, que j’aie rempli de honteuses fonctions, divisé des familles, brouillé des amis, trahi des secrets, murmuré à l’oreille de faux bruits, creusé avec des louanges des mines souterraines dans le cœur des hommes ; que je me les sois attachés par des parjures ou bien que j’aie corrompu la chasteté, le tout pour l’amour égoïste de mes aises, non, monsieur, jamais. Je préférerais mener la vie la plus dure et racheter ainsi le jugement que l’on fait de moi. Je veux périr ici, dans toutes mes espérances d’avenir, si je ne dis pas la vérité.

BONARIO, à part.

Ce n’est pas là un sentiment contrefait. (Haut.) Je suis à blâmer de m’être ainsi abusé sur ton caractère. Je t’en prie, pardonne-moi, et dis-moi ce que tu me veux.

MOSCA.

Monsieur, cela vous concerne ; et bien qu’en apparence j’aie l’air de manquer à mes devoirs et à la reconnaissance que je dois à mon maître, cependant, par l’amour pur que je porte au bien, et par la haine du mal, je dois vous le révéler. À l’heure même où je vous parle, votre père a le projet de vous déshériter.

BONARIO.

Quoi ?

MOSCA.

Et de vous jeter hors de sa maison comme un