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ACTE TROISIÈME.

subtil, tant je suis souple. Oh ! les parasites, race précieuse venue directement d’en haut, et non pas née de la terre parmi les niais et les imbéciles ! Je m’étonne qu’on n’ait pas fait de cette profession une science, tant elle est honorable et recherchée. Les sages de ce monde sont tous, ou peu s’en faut, des parasites ou des sous-parasites. Je ne parle pas de ceux qui n’ont que l’art vulgaire de gagner leur pain, qui n’ont ni maison, ni famille, ni souci de l’avenir, qui pétrissent des contes et en font des amorces pour les oreilles des hommes ; ni de ceux qui ont des inventions de cuisiniers et trouvent d’attrayantes recettes pour flatter l’estomac et le ventre ; ni de ceux qui, grâce à leur humilité de chien couchant, savent ramper, gambader et cajoler servilement, qui se font un revenu de leurs genoux et de leurs grimaces, qui sont l’écho de Milord et lèchent ses habits pour en ôter les mites : je parle de cette canaille fine et élégante qui sait s’élever et descendre presque en même temps comme une flèche, traverser l’air aussi lestement qu’une étoile, faire des crochets comme une hirondelle ; être ici et là, là et ici tout à la fois, prête à toute occasion et pour toutes les fantaisies, et qui change de masque aussi rapidement que la pensée. Voilà la créature qui est née avec le génie de l’art lui-même ; qui ne travaille pas à l’apprendre, mais le pratique par l’instinct de sa propre et excellente nature ; ceux-là, ces mignons, sont les vrais parasites, les autres ne sont que leurs bouffons.

(Bonario entre.)

Qui vient là ? Bonario, le fils du vieux Corbaccio, la personne même que je cherchais. — Cher monsieur, soyez le bien rencontré.