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VOLPONE.

salive d’un homme à jeûn. Je les connais, ses ingrédients, jusqu’au dernier.

MOSCA.

Je ne sais pas, monsieur, mais, ce que c’était, ils le lui ont versé, un peu dans les oreilles, un peu dans les narines, et ils l’ont fait revenir, seulement par l’application du mélange.

CORVINO.

Le diable soit du mélange !

MOSCA.

Et depuis, pour paraître plus soigneux et plus affectionnés encore pour sa santé, ils ont, à des prix très-onéreux, appelé la faculté de médecine en consultation, pour trouver le moyen de le rétablir tout à fait. L’un a conseillé un cataplasme d’épices ; un autre l’application d’un singe écorché sur la poitrine ; un autre préférait un chien au singe ; un quatrième proposait de l’huile avec des peaux de chats sauvages ; à la fin, ils s’accordèrent dans l’opinion que, pour le sauver, il n’y avait pas de moyen plus sûr que de chercher immédiatement quelque jeune femme vigoureuse, pleine de séve, pour coucher près de lui ; telle est la commission dont on m’a chargé, par malheur et bien malgré moi ; aussi viens-je vous en prévenir à la hâte pour avoir votre avis, puisque cela vous intéresse ; car je ne voudrais pas faire quoi que ce soit qui pût contrarier vos espérances, sur lesquelles je fonde aussi toutes les miennes. Songez que, si je ne le fais pas, ils dénonceront ma lenteur à mon patron, et sont capables de me perdre dans son esprit : et voici votre attente déçue et tous vos rêves envolés. Je ne vous dis que cela, monsieur : en outre, ils sont là, tous, se dispu-