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VOLPONE.

autorisé à les répandre publiquement, non-seulement dans cette illustre cité, mais encore dans tous les territoires qui ont le bonheur d’être sous le gouvernement des saints et magnifiques États de l’Italie. Quelque honnête garçon pourra vous dire qu’il y en a d’autres qui prétendent avoir des recettes aussi bonnes, aussi privilégiées que les miennes. En effet, beaucoup ont essayé d’imiter, comme des singes, la composition de cette huile dont le secret n’est qu’à moi. Ils ont fait de grandes dépenses en fourneaux, en alambics, en instruments, en combustibles, en ingrédients de toutes sortes (il y entre plus de six cents espèces de simples, outre une certaine quantité de graisse humaine pour la liaison, que nous achetons aux anatomistes). Mais lorsque les plagiaires arrivent à la dernière décoction, souffle, souffle, pouf, pouf, tout s’en va en fumée. Ha ! ha ! ha ! Pauvres diables ! Je prends en pitié leur folie et leur absence de jugement plus que leur perte d’argent et de temps, car celle-ci peut se recouvrer par l’industrie ; mais la folie est une maladie incurable. Quant à moi, j’ai, depuis ma jeunesse, voué ma vie à la découverte des plus rares secrets, que j’utilise soit pour les échanger, soit pour les vendre. Je n’ai jamais épargné ni argent ni travail là où je trouvais quelque chose digne d’être appris. Messieurs, mes nobles seigneurs, je pourrais, par la vertu de la chimie, extraire de l’honorable chapeau de l’un de vous les quatre éléments, c’est-à-dire le feu, l’air, l’eau et la terre, et vous le rendre ensuite sans qu’il soit ou mouillé, ou brûlé, ou gâté. Car tandis que les autres jouent au ballon, je reste avec mes livres ; et maintenant j’ai gravi les pentes escarpées de