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VOLPONE.

NANO.

Mais tu as renoncé à ton silence dogmatique ?

ANDROGYNO.

Un avocat braillard en est cause.

NANO.

O changement merveilleux ! Quand cet avocat t’a-t-il congédié ? En souvenir de Pythagore, quel corps as-tu pris ?

ANDROGYNO.

Celui d’une bonne lourde mule.

NANO.

Bah ! mais alors il te fut permis de manger des fèves ?

ANDROGYNO.

Oui.

NANO

.

Et de la mule où passas-tu ?

ANDROGYNO.

Au corps d’une bête étrange que certains écrivains appellent un âne, mais d’autres, un frère illuminé, un puritain, de ceux qui mangent de la viande et se mangent quelquefois les uns les autres, de ceux qui laissent tomber un libelle ou un saint mensonge, entre chaque bouchée de ces pâtés qui se font à Noël[1].

NANO.

Hâte-toi, au nom du ciel, de quitter cette nation profane, et dis-nous gentiment quel fut ensuite ton séjour.

ANDROGYNO.

Celui que j’habite encore.

NANO.

Une délicieuse créature ; plus encore qu’un fou, un hermaphrodite ! Maintenant, douce âme, dans toutes ces transmigrations diverses, quel corps choisirais-tu de préférence pour demeure ?

ANDROGYNO.

En vérité, celui où je suis ; j’y voudrais même rester.

  1. Christmas Pie est l’expression usuelle ; les Puritains disaient Nativity Pie, par horreur du mot messe.