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ACTE DEUXIÈME.

vous convaincre. Si, après votre mariage, votre femme s’enfuit avec un bateleur ou avec un Français danseur de corde, ou avec celui qui danse la gigue, ou avec le saltimbanque qui mange des sabres, ce ne sera pas la faute de vos amis ; ils auront fait leur devoir, puisque vous saurez par eux ce qui peut vous arriver. Souffrez donc vaillamment, monsieur ; car je dois vous énumérer tous les dangers auxquels vous vous exposez. Si elle a de la beauté, de la jeunesse et de la sève, ce sont là les sucreries qui attirent le plus les mouches, tous les pourpoints jaunes et les nœuds de rubans en forme de rose [1] seront bientôt chez elle ; si elle est laide et bossue, c’est elle qui ira les trouver et qui payera les pourpoints jaunes et les nœuds de rubans ; si elle est riche et que vous l’épousiez pour sa dot, elle régnera dans votre maison plus impérieuse qu’une veuve ; si elle est noble, tous ses parents seront vos tyrans ; si elle est féconde, elle sera aussi vaine que mai, aussi capricieuse qu’avril ; elle aura à chaque instant les docteurs, les sages-femmes, les gardes et les envies de femme grosse, quand même il s’agirait du plus cher morceau d’un homme ; si elle est savante, il n’y eut jamais un pareil perroquet ; tout votre patrimoine sera insuffisant à nourrir les convives que vous devrez inviter pour l’entendre parler grec et latin, et il faudra que vous couchiez avec elle dans l’un de ces deux langages, si vous voulez lui plaire ; si elle est puritaine, vous devrez inviter, tous les trois jours,

  1. Les gens à la mode portaient des pourpoints jaunes, et sur le cou-de-pied des nœuds de rubans en forme de roses ; — de là sans doute l’expression rosettes.