Page:Jonson-Volpone Epicene l alchimiste-1863.djvu/116

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
93
ACTE TROISIÈME.

n’en dis pas davantage, sinon, tu es perdue. Reste ici, je ne veux pas de toi.

(Il ferme la porte sur elle en s’en allant avec Mosca.)
CELLA.

O Dieu, et vous, ses saints anges, comment, comment la honte s’est-elle enfuie de tous les cœurs ? comment l’homme ose-t-il si facilement vendre son honneur et le vôtre ? faut-il que la vertu, cette raison de la vie, s’avilisse et tombe si bas, que toute pudeur soit bannie, et cela pour de l’or !

VOLPONE, se levant de sa couche.

Oui, c’est le crime de Corvino, et de ses vils pareils qui n’ont jamais goûté le paradis de l’amour. Sois sûre, Célia, que celui qui veut te vendre dans l’espoir d’un gain incertain, celui-là céderait sa part de paradis pour de l’argent comptant, s’il trouvait avec qui traiter. Pourquoi, es-tu si émerveillée de me voir ainsi presque ressuscité ? Applaudis plutôt le miracle qu’a fait ta beauté ; c’est son ouvrage ; c’est elle qui, non une fois, mais plusieurs fois, m’a fait revêtir différentes formes, et, ce matin même, celle de charlatan pour te voir à ta fenêtre. Ah ! plutôt que de renoncer à l’art de me transformer pour parvenir jusqu’à toi, j’aurais lutté avec Protée lui-même et Achéloüs. Tu es la bienvenue.

CÉLIA.

Monsieur.

VOLPONE.

Non, ne me fuis pas, et parce que tu me vois sur ce lit de malade, ne t’imagine pas que je sois un moribond. Je suis maintenant aussi frais, aussi jeune, aussi ardent, en humeur aussi joyeuse que lorsque,