toute ma fortune t’appartiendra et, tant que je serai de ce monde, tu pourras disposer de la moitié, la dépenser comme un autre moi-même. Regarde ces clefs, je te les donnerai tout à l’heure. Achète des vêtements… Réflexion faite, tu n’en as pas besoin. Écoute seulement ce que tu as à faire. D’abord, va me chercher le pot de riz qui, pour notre souper, cuit sur le feu.
Je parierais ma tête que mon maître meurt de faim. (Haut). J’y vais, seigneur.
Ainsi tout coquin aspire à la richesse, bien qu’il ne doive être jamais riche que d’espérance. Taisons-nous !
Le voici, maître.
Bien. As-tu apporté aussi la cuillère ?
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Oui, maître. Le proverbe dit que celui qui soupe avec le diable a besoin d’une longue cuillère. Je vous en ai apporté une.
Parfait. Maintenant garde-moi fidèlement le secret. Par ton salut sur lequel je veille, à la mort d’Abigaïl, tu pourras régler ta vie comme étant mon héritier.
Auriez-Vous l’intention de l’empoisonner avec un plat de soupe au riz ? Le riz la conservera en vie, la rendra plus grasse, plus dodue, plus rondelette que vous n’êtes instruit.
Regarde ceci : une poudre précieuse achetée à un Italien, dans Ancône. Son effet, qui immobilise, infecte, empoisonne, ne se produit que quarante heures après l’absorption.
Que me dites-vous, maître ?
Il en est ainsi. Je m’en suis souvent servi à Malte. On l’appelle le Soir de Saint-Jacques. Ce soir-là on envoie des aumônes aux couvents. Tu emporteras ce pot et le déposeras dans un coin noir où ils ont l’habitude de recueillir les susdites aumônes sans s’inquiéter de qui les distribue et d’où elles viennent.