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ACTE I


Scène PREMIERE

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Barabas, le marchand, le second marchand, les trois juifs
(On voit Barabas dans sa maison avec un monceau d’or devant lui.).
Barabas

De la façon le compte est fait ; le tiers du butin pris sur les vaisseaux persans, estimé et réglé. Comme avec les Samnites et les gens d’Uz, acheteurs de mes huiles d’Espagne et de mes vins de Grèce, j’ai encaissé leurs misérables pièces d’argent. Fi ! quel mal on éprouve à calculer tant de menues monnaies et quelle différence avec les Arabes qui paient en lingots d’or, si bien qu’un jour suffit à un homme pour calculer de quoi le faire vivre toute sa vie. Un pauvre besogneux n’ayant jamais effleuré un sou, crierait au miracle à la vue de tant d’argent ; un homme dont les coffres d’acier regorgent de pièces et qui, sa vie entière, s’est usé les doigts à les compter, possède le droit de répugner à un pareil travail et, pour une livre, de suer à en mourir. Parlez-moi des mineurs indiens trafiquant du métal dans la forme la plus pure ; du riche Maure extrayant des rochers de l’Est, et, sans contrôle, des richesses ; entassant des perles comme il entasserait des cailloux, sans payer de droits, pour les revendre au poids ; alignant des paniers d’opales enflammées, de saphirs, d’améthystes, d’hyacinthes, de topazes, d’émeraudes couleur de gazon, de beaux rubis, de diamants étincelants, de pierres rares et d’un si grand prix, que l’une d’elles prise au hasard, ne pesât-elle qu’un