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éternellement dans le vague. Une seule grande vérité ressort de toutes les théories théologiques, c’est que tous les peuples, dans tous les temps et dans tous les pays, ont reconnu l’existence d’une cause suprême, infinie, inconnue dans son essence, mais merveilleuse dans ses manifestations : on lui a donné des noms divers, mais, au fond, aujourd’hui que les études sont armées de deux instruments nouveaux, le microscope et le télescope, tous les penseurs voient leurs théories s’égarer plus que jamais dans l’infini et sont tenus de s’avouer vaincus dans leur besoin d’expliquer les origines du monde et la nature de son créateur. Mieux vaut s’arrêter au vers de Voltaire :


« Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer »


Contentons-nous donc de cette vérité qui satisfait notre intelligence et tenons-nous en à cette sublime maxime : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse ». Là sont toutes les lois, toute la morale, dans le présent et dans l’avenir. Notre pauvre esprit humain est pétri d’erreurs et de préjugés qui se transmettent de siècle en siècle et qu’il n’est pas facile de déraciner. Ainsi, de tout temps, pour assurer son existence, l’homme s’est appliqué à détruire son semblable et, en général, tout ce qui l’entoure, animal ou végétal : on lui a enseigné l’histoire, la poésie, l’éloquence, la théologie, l’art de la guerre, etc., mais, pendant des siècles, on a oublié que le premier des arts consistait, non à guerroyer ou à parler, mais à produire, en d’autres termes, que l’Agriculture était la première, la plus noble de toutes les industries, qu’elle devait passer avant tout, parce qu’elle occupe les trois quarts de la population et qu’elle sert à satisfaire la première des lois : la loi de vie. Voyez encore, à l’heure qu’il est, l’opinion générale : qu’il s’agisse d’une combinaison ministérielle, s’il y a un membre sans couleur, sans influence dans le cabinet, on le mettra au commerce et à l’agriculture : si, dans les familles, il y a un fils moins brillant que les autres, on se console, on en fera un campagnard ou un commerçant !

Ce n’est guère qu’au XIXe siècle qu’on voit surgir partout des