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Montesquieu.

C’est heureux.

Machiavel.

Sans doute j’ai peu d’admiration, je l’avoue, pour vos civilisations à cylindres et à tuyaux ; mais je marche, croyez-le bien, avec le siècle ; la puissance des doctrines auxquelles est attaché mon nom, c’est qu’elles s’accommodent à tous les temps et à toutes les situations. Machiavel aujourd’hui a des petits-fils qui savent le prix de ses leçons. On me croit bien vieux, et tous les jours je rajeunis sur la terre.

Montesquieu.

Vous raillez-vous ?

Machiavel.

Écoutez-moi et vous en jugerez. Il s’agit moins aujourd’hui de violenter les hommes que de les désarmer, de comprimer leurs passions politiques que de les effacer, de combattre leurs instincts que de les tromper, de proscrire leurs idées que de leur donner le change en se les appropriant.

Montesquieu.

Et comment cela ? Car je n’entends pas ce langage.

Machiavel.

Permettez ; c’est là la partie morale de la politique, nous arriverons tout à l’heure aux applications. Le principal secret du gouvernement con-