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à celle de Charlemagne[1]. Sans doute l’hérédité est venue se substituer à l’élection. L’éclat des services rendus, la reconnaissance publique, les traditions ont fixé la souveraineté dans les principales familles de l’Europe, et rien n’était plus légitime. Mais le principe de la toute-puissance nationale s’est constamment retrouvé au fond des révolutions, il a toujours été appelé pour la consécration des pouvoirs nouveaux. C’est un principe antérieur et préexistant qui n’a fait que se réaliser plus étroitement dans les diverses constitutions des États modernes.

Machiavel.

Mais si ce sont les peuples qui choisissent leurs maîtres, ils peuvent donc aussi les renverser ? S’ils ont le droit d’établir la forme de gouvernement qui leur convient, qui les empêchera d’en changer au gré de leur caprice ? Ce ne sera pas le régime de l’ordre et de la liberté qui sortira de vos doctrines, ce sera l’ère indéfinie des révolutions.

Montesquieu.

Vous confondez le droit avec l’abus qui peut résulter de son exercice, les principes avec leur application ; ce sont là des distinctions fondamentales, sans lesquelles on ne peut s’entendre.

Machiavel.

N’espérez pas m’échapper, je vous demande

  1. Esp. des lois, p. 543, 544, liv. XXXI, ch. IV.