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de ses pasteurs. Si son émancipation politique eût été entreprise alors, elle eût pu l’être sans danger ; car elle se fût accomplie en conformité des principes sur lesquels repose l’existence de toutes les sociétés. Mais, avec vos grands États, qui ne vivent plus que par l’industrie ; avec vos populations sans Dieu et sans foi, dans des temps où les peuples ne se satisfont plus par la guerre, et où leur activité violente se reporte nécessairement au dedans, la liberté, avec les principes qui lui servent de fondement, ne peut être qu’une cause de dissolution et de ruine. J’ajoute qu’elle n’est pas plus nécessaire aux besoins moraux des individus qu’elle ne l’est aux États.

De la lassitude des idées et du choc des révolutions sont sorties des sociétés froides et désabusées qui sont arrivées à l’indifférence en politique comme en religion, qui n’ont plus d’autre stimulant que les jouissances matérielles, qui ne vivent plus que par l’intérêt, qui n’ont d’autre culte que l’or, dont les mœurs mercantiles le disputent à celles des juifs qu’ils ont pris pour modèles. Croyez-vous que ce soit par amour de la liberté en elle-même que les classes inférieures essayent de monter à l’assaut du pouvoir ? C’est par haine de ceux qui possèdent ; au fond, c’est pour leur arracher leurs richesses, instrument des jouissances qu’ils envient.

Ceux qui possèdent implorent de tous les côtés