pendant si longtemps sur les principes qui président à l’organisation des pouvoirs. Comment, lorsque le principe de la souveraineté résidait uniquement dans la personne du prince, le droit de la nation pouvait-il être affirmé ? Comment, lorsque celui qui était chargé de faire exécuter les lois, était en même temps le législateur, sa puissance n’eût-elle pas été tyrannique ? Comment les citoyens pouvaient-ils être garantis contre l’arbitraire, lorsque, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif étant déjà confondus, le pouvoir judiciaire venait encore se réunir dans la même main[1] ?
Je sais bien que certaines libertés, que certains droits publics qui s’introduisent tôt ou tard dans les mœurs politiques les moins avancées, ne laissaient pas que d’apporter des obstacles à l’exercice illimité de la royauté absolue ; que, d’un autre côté, la crainte de faire crier le peuple, l’esprit de douceur de certains rois, les portaient à user avec modération des pouvoirs excessifs dont ils étaient investis ; mais il n’en est pas moins vrai que ces garanties si précaires étaient à la merci du monarque qui possédait en principe les biens, les droits et la personne des sujets. La division des pouvoirs a réalisé en Europe le problème des sociétés libres, et si quelque chose peut adoucir pour moi l’anxiété des heures qui précèdent le jugement dernier, c’est la pensée que mon passage
- ↑ Esp. des lois, p. 129, liv. XI, ch. VI.