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lement je tiendrais en échec, de la part des États voisins, toute entreprise contre la souveraineté du Saint-Siège, mais si, par malheur, il était attaqué, si le Pape venait à être chassé des États pontificaux, comme cela s’est déjà vu, mes baïonnettes seules l’y ramèneraient et l’y maintiendraient toujours, moi durant.

Montesquieu.

En effet, ce serait un coup de maître, car si vous teniez à Rome une garnison perpétuelle, vous disposeriez presque du Saint-Siège, comme s’il résidait dans quelque province de votre royaume.

Machiavel.

Croyez-vous qu’après un tel service rendu à la papauté, elle refuserait de soutenir mon pouvoir, que le Pape même, au besoin, refuserait de venir me sacrer dans ma capitale ? De tels événements sont-ils sans exemple dans l’histoire ?

Montesquieu.

Oui, tout se voit dans l’histoire. Mais enfin, si au lieu de trouver dans la chaire de Saint-Pierre un Borgia ou un Dubois, comme vous paraissez y compter, vous aviez en face de vous un pape qui résistât à vos intrigues et bravât votre colère, que feriez-vous ?

Machiavel.

Alors, il faudrait bien s’y résoudre, sous pré-