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matière, ma règle de conduite est de m’abstenir autant que possible. Dans les États où le barreau est constitué en corporation, les justiciables regardent l’indépendance de cette institution comme une garantie inséparable du droit de la défense devant les tribunaux, qu’il s’agisse de leur honneur, de leur intérêt ou de leur vie. Il est bien grave d’intervenir ici, car l’opinion pourrait s’alarmer sur un cri que ne manquerait pas de jeter la corporation tout entière. Cependant, je n’ignore pas que cet ordre sera un foyer d’influences constamment hostiles à mon pouvoir. Cette profession, vous le savez mieux que moi, Montesquieu, développe des caractères froids et opiniâtres dans leurs principes, des esprits dont la tendance est de rechercher dans les actes du pouvoir l’élément de la légalité pure. L’avocat n’a pas au même degré que le magistrat le sens élevé des nécessités sociales ; il voit la loi de trop près, et par des côtés trop petits pour en avoir le sentiment juste, tandis que le magistrat…

Montesquieu.

Épargnez l’apologie.

Machiavel.

Oui, car je n’oublie pas que je suis devant un descendant de ces grands magistrats qui soutinrent avec tant d’éclat, en France, le trône de la monarchie.