Page:Joly - Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu.djvu/172

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 159 —

Machiavel.

Le fait d’organiser une société secrète, ou de s’y affilier, sera puni rigoureusement.

Montesquieu.

Bien, pour l’avenir ; mais les sociétés existantes ?

Machiavel.

J’expulserai, par voie de sûreté générale, tous ceux qui seront notoirement connus pour en avoir fait partie. Ceux que je n’atteindrai pas resteront sous le coup d’une menace perpétuelle, car je rendrai une loi qui permettra au gouvernement de déporter, par voie administrative, quiconque aura été affilié.

Montesquieu.

C’est-à-dire sans jugement.

Machiavel.

Pourquoi dites-vous : sans jugement ? La décision d’un gouvernement n’est-elle pas un jugement ? Soyez sûr qu’on aura peu de pitié pour les factieux. Dans les pays incessamment troublés par les discordes civiles, il faut ramener la paix par des actes de vigueur implacables ; il y a un compte de victimes à faire pour assurer la tranquillité, on le fait. Ensuite, l’aspect de celui qui commande devient tellement imposant, que nul n’ose attenter à sa vie. Après avoir couvert de sang l’Italie, Sylla put reparaître dans Rome en simple particulier ; personne ne toucha un cheveu de sa tête.