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Montesquieu.

Mais en agissant ainsi vous ne déguisez rien pour personne. Comment, en votant dans ces conditions, le peuple peut-il savoir ce qu’il fait et jusqu’à quel point il s’engage ?

Machiavel.

Et où avez-vous jamais vu qu’une constitution vraiment digne de ce nom, vraiment durable, ait jamais été le résultat d’une délibération populaire ? Une constitution doit sortir tout armée de la tête d’un seul homme ou ce n’est qu’une œuvre condamnée au néant. Sans homogénéité, sans liaison dans ses parties, sans force pratique, elle portera nécessairement l’empreinte de toutes les faiblesses de vues qui ont présidé à sa rédaction.

Une constitution, encore une fois, ne peut être que l’œuvre d’un seul ; jamais les choses ne se sont passées autrement, j’en atteste l’histoire de tous les fondateurs d’empire, l’exemple des Sésostris, des Solon, des Lycurgue, des Charlemagne, des Frédéric II, des Pierre Ier.

Montesquieu.

C’est un chapitre d’un de vos disciples que vous allez me développer là.

Machiavel.

Et de qui donc ?

Montesquieu.

De Joseph de Maistre. Il y a là des considérations générales qui ne sont pas sans vérité, mais