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HÉLOÏSE ET ABÉLARD.



Ce monument du plus grand intérêt, et qui fit long-temps un des principaux ornements du Musée des Monuments Français[1], est un des premiers qui attirent les regards en entrant dans le cimetière du Mont-Louis, et un des premiers, sans doute, que cherchent à rencontrer ceux qui se rappellent avec émotion l’histoire touchante de ces infortunes amants.

Au milieu d’une chapelle sépulcrale, construite dans le goût du douzième siècle, sur les dessins de M. Lenoir, avec les débris d’une chapelle du Paraclet et de l’abbaye de Saint-Denis, est placé le tombeau ou Pierre de Cluni, dit le Vénérable[2], fit d’abord ensevelir le corps d’Abélard, et qui, resté vide pendant sept siècles, renferme aujourd’hui les restes de ces deux époux indissolublement réunis l’un à l’autre[3].

  1. Ce musée n’existe plus ; la plupart des objets qui y avaient été réunis, et qui, presque tous, avaient été enlevés aux églises ou aux édifices publics au commencement de la révolution, ont été rendus à leur ancienne destination, ou transférés au musée du Louvre ; ce lieu est maintenant destiné à l’École royale des Beaux-Arts.
  2. Abélard mourut en 1142, au prieuré de Saint-Marcel de Châlons-sur-Saône : son ami Pierre de Cluni fit déposer son corps dans un tombeau qu’il lui érigea dans la chapelle de l’infirmerie, et d’où, peu de temps après, il le fit enlever furtivement pour l’envoyer au Paraclet, où était Héloïse, qui plaça ce précieux dépôt dans une chapelle qu’Abélard avait bâtie, et qu’on appelait le petit Moustier. Héloïse mourut en 1163, et, selon son désir, le même cercueil réunit sa dépouille mortelle à celle de son époux. En 1497, on transféra leur tombeau dans la grande église du monastère ; leurs corps furent séparés et placés dans deux tombes différentes. Enfin, madame Roye de la Rochefoucault voulut élever un monument plus riche à la gloire de ces illustres modèles d’amour et de constance, il ne fut terminé qu’après sa mort en 1779, et, comme tant d’autres, fut détruit pendant la tourmente révolutionnaire.

    Mais M. Lenoir, fondateur et administrateur du musée des monuments français, aujourd’hui conservateur des monuments de l’abbaye royale de Saint-Denis, et qui s’est acquis tant de titres à la reconnaissance publique et à celle de tous les amis des arts par le zèle infatigable avec lequel il est parvenu à soustraire à la destruction générale les monuments les plus précieux de notre ancienne France, a su créer avec des fragments que l’on peut appeler historiques, réunis avec le plus grand art, ce nouveau mausolée, qu’il a dédié la mémoire d’Héloïse et d’Abélard.

  3. Ce tombeau a été conservé par les soins de M. Roisset, médecin à Châlons-sur-Saône, qui l’avait acheté pour le soustraire à la destruction, et qui en fit hommage au Musée des Monuments Français.