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de l’espèce humaine, en refusant d’avance de tenir compte de ses facultés, quelque distinguées qu’elles puissent être ? Lors même que nous pourrions nous en passer, comment concilier avec la justice le refus que nous leur faisons de la part d’honneur et de distinctions qui leur revient, ou du droit moral de tous les humains à choisir leurs occupations (hormis celles qui font tort à autrui) d’après leurs propres préférences et à leurs propres risques ? Et ce n’est pas là que s’arrête l’injustice ; elle frappe aussi ceux qui pourraient profiter du service de ces femmes. Ordonner que des personnes soient exclues de la profession médicale, du barreau ou du parlement, ce n’est pas léser ces personnes seules, c’est léser toutes celles qui voudraient employer leurs services dans la médecine, le barreau ou le parlement ; c’est supprimer à leur détriment l’influence excitante qu’un nombre plus grand de concurrents exercerait sur les compétiteurs, c’est restreindre le champ où leur choix peut s’exercer.

Je me bornerai dans les détails de ma thèse aux fonctions publiques ; cela suffira, je pense, puisque, si je réussis sur ce point, on m’accordera facilement que les femmes devraient être admissibles à toutes les autres occupations auxquelles il peut être important pour elles d’être admises. Je commencerai par une fonction très différente de toutes les autres, dont on ne peut