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la première, avec l’obligation morale et religieuse la plus forte de ne se révolter contre aucun excès d’oppression.

Un adversaire obstiné, acculé à ses derniers retranchements, dira peut-être que les maris veulent bien faire des concessions convenables à leurs associées sans y être forcés, en un mot se montrer raisonnables, mais que les femmes ne le sont pas : que si on accordait aux femmes des droits, elles n’en reconnaîtraient à personne, et qu’elles ne céderaient plus sur rien, si elles n’étaient plus forcées par l’autorité de l’homme à céder sur tout. Il y a quelques générations, beaucoup de personnes auraient tenu ce langage ; alors les satires sur les femmes étaient à la mode, et les hommes croyaient faire merveille en reprochant injurieusement aux femmes d’être ce qu’ils les faisaient. Mais aujourd’hui ce bel argument n’a plus pour lui personne qui mérite une réponse. L’opinion du jour n’est plus que les femmes sont moins que les hommes susceptibles de bons sentiments et de considération pour ceux à qui elles sont unies par les liens les plus forts. Au contraire, les gens qui s’opposent le plus à ce qu’on les traite comme si elles étaient aussi bonnes que les hommes répètent sans cesse qu’elles sont meilleures ; cet aveu a même fini par devenir une formule fastidieuse d’hypocrisie destinée à couvrir une injure par une grimace de compliment, qui nous