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est ou paraît être de telle manière, quelle que soit cette manière, on suppose qu’elle a une tendance naturelle à être ainsi, lors même que la connaissance la plus élémentaire des circonstances où elle a été placée indique clairement les causes qui en ont fait ce que nous la voyons. De ce qu’un fermier irlandais sans bail, arriéré dans le payement de ses fermages, n’est pas diligent au travail, il y a des gens qui pensent que les Irlandais sont naturellement fainéants. Parce que, en France, les constitutions peuvent être renversées quand les autorités nommées pour les faire respecter tournent leurs armes contre elles, il y a des gens qui pensent que les Français ne sont pas faits pour un gouvernement libre. Parce que les Grecs trompent les Turcs qui pillent les Grecs sans vergogne, il y a des gens qui pensent que les Turcs sont naturellement plus sincères que les Grecs. Parce qu’on dit souvent que les femmes n’accordent en politique leur attention qu’aux personnages, on suppose que c’est par une disposition naturelle qu’elles s’intéressent moins que les hommes au bien général. L’histoire mieux comprise aujourd’hui qu’autrefois nous donne d’autres enseignements ; elle nous montre l’extrême susceptibilité de la nature humaine à subir l’influence des causes extérieures et l’excessive variabilité de cela même qui chez elle passe pour le plus constant et le plus