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sont que des faillites cachées sous l’apparence de la fortune. Mais si les circonstances que la société n’a pas encore l’adresse de dominer rendent souvent ces faillites inévitables pour le présent, rien n’oblige la société à les infliger elle-même. Des parents inconsidérés, l’inexpérience de la jeunesse, le manque d’occasion pour dévoiler leur vocation naturelle, et au contraire la rencontre d’occasions pour pousser à une vocation antipathique, condamnent quantité d’hommes à passer leur vie dans des occupations dont ils s’acquittent mal et avec répugnance, tandis qu’il y en a d’autres qu’ils auraient remplies avec succès et avec bonheur. Cette condamnation, c’est la loi (ou des habitudes aussi fortes que des lois), qui la porte sur les femmes. Ce que dans les sociétés où les lumières n’ont pas pénétré, la couleur, la race, la religion, ou la nationalité dans les pays conquis, sont pour certains hommes, le sexe l’est pour toutes les femmes ; c’est une exclusion radicale de presque toutes les occupations honorables autres que celles qui ne peuvent être remplies par d’autres, ou que ces autres ne trouvent pas dignes d’eux. Les souffrances provenant de ces sortes de causes rencontrent d’ordinaire si peu de sympathie, que peu de personnes ont connaissance de la masse de souffrance que produit aujourd’hui encore le sentiment d’une vie gaspillée ; ces souf-