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quelque limite à l’insolente tyrannie des seigneurs féodaux. Cette tyrannie dura encore longtemps après que les opprimés furent assez forts pour en tirer d’éclatantes vengeances. Sur le continent, beaucoup de pratiques tyranniques se continuèrent jusqu’à la révolution française ; mais en Angleterre, bien avant cette époque, les classes démocratiques mieux organisées que sur le continent y mirent fin par des lois d’égalité et des institutions libres.

On sait en général fort peu que, dans la plus grande partie de l’histoire, la loi de la force fut l’unique et absolue règle de conduite, toute autre n’étant que la conséquence spéciale et exceptionnelle de relations particulières. On ne sait pas que le temps n’est pas encore éloigné, où l’on a commencé à croire que les affaires de la société doivent être réglées d’après des lois morales ; mais on ignore encore davantage que des institutions et des coutumes sans autre fondement que la loi de la force se conservent à des époques, et sous l’empire d’opinions qui n’eussent jamais souffert leur établissement. Les Anglais pouvaient, il n’y a pas encore quarante ans, tenir en servitude des êtres humains, les vendre et les acheter ; au commencement de ce siècle, ils pouvaient encore s’emparer d’eux dans leurs pays. Cet extrême abus de la force condamné par ceux qui pouvaient souffrir presque toutes les autres formes