seigneur avec son vassal, sauf cette différence que la femme est tenue à plus d’obéissance envers son mari qu’autrefois le vassal n’en devait à son seigneur. Que le caractère du vassal devînt meilleur ou pire par l’effet de cette subordination, qui ne voit que le caractère du seigneur devenait pire, soit qu’il en vînt à considérer ses vassaux comme inférieurs à lui, soit qu’il se sentît mis au-dessus des gens aussi bons que lui, sans l’avoir mérité, et uniquement, comme dit Figaro, pour avoir pris la peine de naître ? Le culte que le monarque ou le seigneur féodal se rendent à eux-mêmes ont leur pendant dans le culte que le mâle se rend à lui-même. Les hommes ne sont pas élevés dès l’enfance dans la possession de distinctions qu’ils n’ont pas méritées, sans en tirer raison de s’enorgueillir. Ceux qui, en possession des privilèges qu’ils n’ont pas acquis par leur mérite, sentent que leur valeur n’est pas à la hauteur de ces privilèges, et en deviennent plus humbles, sont peu nombreux, et ne se doivent chercher que parmi les meilleurs. Les autres sont bouffis d’orgueil et de la pire espèce d’orgueil, qui consiste à s’estimer non pour ses propres actions, mais pour des avantages dus au hasard. Ceux dont le fond du caractère est consciencieux et tendre, se sentant élevés au-dessus de tout un sexe et investis de l’autorité sur un de ses membres, apprennent
Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/156
Cette page a été validée par deux contributeurs.