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et les arts, il faudrait qu’elles eussent à leur disposition une richesse bien plus grande de facultés actives que la plupart des hommes. Mais ce n’est pas tout. Indépendamment des devoirs ordinaires de la vie qui sont le partage des femmes, on exige qu’elles tiennent leur temps et leur esprit à la disposition de tout le monde. Si un homme a une profession qui le mette à l’abri de ces prétentions, ou même une occupation, il n’offense personne en y consacrant son temps ; il peut s’y retrancher pour s’excuser de ne pas répondre à toutes les exigences des étrangers. Est-ce que les occupations d’une femme, surtout celles qu’elle choisit volontairement, sont regardées comme des excuses qui dispensent des devoirs de société ? C’est à peine si leurs devoirs les plus nécessaires et les plus reconnus les en exemptent. Il ne faut pas moins qu’une maladie dans la famille ou toute autre chose d’extraordinaire pour les autoriser à faire passer leurs propres affaires avant les plaisirs d’autrui. La femme est toujours aux ordres de quelqu’un, et en général de tout le monde. Si elle s’occupe d’une étude, il faut qu’elle y consacre les courts instants qu’elle a le bonheur de saisir au vol. Une femme illustre remarque dans un livre qui sera publié quelque jour, je l’espère, que tout ce qu’une femme fait se fait à temps perdu. Est-il donc étonnant qu’elle n’arrive pas au