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tions académiques et de revenir humblement à la Nature, sans rien rejeter, sans rien mépriser, sans même choisir. Il est bien évident que Canaletto, Poussin et Claude ne suivirent pas cette voie ; aussi ne furent-ils que des aveugles conduisant d’autres aveugles. Nos peintres anglais modernes (et le jeune critique ne savait certainement rien des étrangers) fixaient leurs regards sur les choses de la nature et les reproduisaient comme ils les voyaient ; si des hommes comme Prout, C. Fielding, Harding, Cox se limitaient à des études partielles, Turner, lui, avait tout reproduit : les arbres, les rivières, la mer, les nuages, les montagnes, dans tous leurs détails, sous toutes leurs couleurs et sous tous leurs aspects, transfigurant chaque objet avec son sentiment poétique et la magie de sa vision.

Cette doctrine, — une vraie doctrine après tout, qui a prévalu et domine aujourd’hui, — se trouvait donc affirmée avec une assurance militante que seul pouvait se permettre un premier prix d’Oxford qui vient de prendre ses grades, et avec une subtilité, une imagination, surtout une passion dont nul homme vivant n’était alors capable. Toutes ces affirmations s’appuyaient çà et là sur des réminiscences des philosophes grecs, sur l’avis d’Aristote de ne tenir pour vrai que ce qui est dûment prouvé, sur les protestations de