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C’est une pièce rendue touchante par les circonstances, c’est presque un beau poème par sa grâce parfaite et sa tendresse, sans trace d’aucun reproche, d’aucune amertume, et même d’aucune désillusion. Dans un songe, il croit voir les fleurs de la nuit s’épanouir sous son sourire :

« Ce sourire qui tombait sur les rochers glacés, sur les vagues
Libres et insensibles — Hélas, pourquoi ne tombe-t-il pas sur moi ?

Adèle épousa le baron Duquesne, en mars 1840. On essaya de cacher la nouvelle à l’amoureux qui préparait alors un examen à Oxford. Il déclare (cinquante ans plus tard) qu’il n’en fut point écrasé comme il s’y serait attendu, mais sa santé parut démentir cette assertion, car elle présenta bientôt des symptômes de consomption. « À Paris, les choses s’acheminaient doucement vers l’abîme » (L’abîme c’était le mariage d’Adèle Domecq), lorsqu’une nuit, une toux de courte durée amena un crachement de sang. Les médecins immédiatement consultés ordonnèrent un voyage à l’étranger ; le Doyen ajourna l’examen, le commerçant laissa ses affaires et toute la famille partit pour le continent et passa l’hiver à Rome. Pendant près de deux ans, John resta valétudinaire, se déplaçant sans but, l’esprit aussi vagabond que le corps. Le mariage Duquesne fut heureux : la famille Do-