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ment avec les siennes. J’eus souvent l’occasion, soit en particulier, soit en public, de lui rappeler que plus d’une de ses doctrines sociales avaient été formulées avant lui par Auguste Comte. Cela peut sembler paradoxal d’unir dans la même phrase le plus systématique des écrivains modernes avec celui qui le fut le moins, l’esprit le plus scientifique avec le plus métaphysique, le philosophe et le poète, le plus organique des penseurs modernes et le plus anarchique. Comte n’entendit jamais parler de Ruskin[1] et Ruskin ne fit jamais mention de Comte si ce n’est par quelque grotesque parodie de ce qu’il imaginait que Comte avait dit, alors qu’il avait réellement dit le contraire. Il reste cependant que Comte et Ruskin s’accordent au fond dans leurs vues sur la poésie et la religion grecques, le Moyen Age, le catholicisme, les grands poètes, dans leur hommage à Dante et Scott, dans leur admiration pour l’architecture gothique et l’art italien ; et aussi dans leur défiance vis-à-vis de tout ce que peuvent offrir l’Industrialisme moderne, l’économie politique, l’émancipation des femmes, la démocratie, le parlementarisme, et le dogmatisme des hypothèses scientifiques. Un disciple de Comte aussi bien qu’un compagnon de Saint Georges,

  1. Auguste Comte a mentionné en termes sympathiques le nom de Ruskin dans deux lettres écrites par lui en 1857 à son disciple anglais John Fisher (Note du trad.).