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le robinson suisse.

nous régalâmes à cœur joie. On aurait dit vraiment que nous nous trouvions devant une de ces magnifiques serres chaudes d’Europe ; mais, au lieu de petits pots, de casiers, d’étroits gradins en planches, des rochers soutenaient sur leurs larges saillies eu laissaient sortir ces fleurs et ces plantes.

Je fis encore une autre découverte, celle du karatas aux larges feuilles terminées en pointe et qui peuvent servir à faire du fil, tandis que la tige donne de l’amadou, et, broyée et pulvérisée, devient un excellent appât pour prendre le poisson. « Mes enfants, m’écriai-je, accourez ici ; venez voir une plante bien plus précieuse, par son utilité, que les ananas. »

C’est à peine si mes petits gourmands, très-occupés à manger des ananas, daignèrent regarder mon karatas ; puis ils me dirent en riant qu’ils l’examineraient quand il porterait des fruits. Alors je me tournai vers Ernest ; je lui demandai s’il pourrait m’allumer du feu avec mon briquet.

« Papa, me répondit-il, très-volontiers, mais je n’ai pas d’amadou.

moi. — Eh bien, ne peux-tu pas m’allumer du feu sans amadou ?

ernest. — Si, à la manière des sauvages, en frottant deux morceaux de bois l’un contre l’autre jusqu’à ce qu’ils prennent feu.

moi. — Moyen un peu long ; et puis, du bois convenable pour cela, je n’en vois pas ici.

ernest. — Comment faire ?

moi. — Tiens, regarde ! »

Après avoir arraché une des tiges du karatas, j’en ôtai la moelle et je l’allumai à l’instant même en frappant au-dessus deux pierres à fusil. Mes enfants furent remplis d’admiration, et ma femme apprit avec plaisir qu’on pouvait tirer du fil des feuilles de la même plante. Elle commençait déjà à