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le robinson suisse.

les branches inutiles, à arranger au-dessus de nos têtes celles qui devaient nous servir de toit. Ce fut au moyen d’une poulie que je montai les planches que ma femme attachait en bas. Bientôt notre édifice commença à avoir une forme. Appuyé d’un côté au tronc énorme de l’arbre et aux branches inférieures, recouvert en haut par une toile à voile, il regardait par sa large ouverture la mer, dont nous sentions l’air frais venir jusqu’à nous.

Ces travaux nous prirent la moitié de la journée, et, quand midi arriva, nous nous contentâmes de faire lestement un léger déjeuner afin de nous remettre aussitôt à notre construction, à laquelle nous ajoutâmes tout autour une balustrade. L’édifice étant terminé, mon fils et moi descendîmes sous les racines, et le reste de nos planches fut employé à faire une table et un banc.

J’étais accablé de fatigue, la sueur couvrait mon front, et je ne pus m’empêcher de dire à ma femme : « J’ai fait vraiment aujourd’hui une besogne de galérien, aussi je veux me reposer demain.

ma femme. — Tu ne pouvais pas mieux choisir ton jour de repos : d’après mon calcul, je crois que demain doit être le second dimanche que nous passons ici depuis notre naufrage. Le premier s’est écoulé malheureusement sans que nous le remarquions, par suite de nos travaux excessifs ; tâchons qu’il n’en soit pas ainsi du second, qu’il faut consacrer au Seigneur.

moi. — Je suis de ton avis. Dieu sait que la nécessité seule nous a empêchés de lui rendre les hommages qui lui sont si justement dus ; demain nous l’honorerons d’une manière spéciale ; mais laissons ignorer notre intention à cet égard à nos enfants, afin de leur ménager une agréable surprise. Maintenant, dis-moi donc ce que tu vas nous donner à manger pour étrenner la table neuve que j’ai fabriquée. J’ai grand appétit.

ma femme. — Appelle tes enfants. »