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le robinson suisse.

promptement possible, à Falkenhorst, y emmener tous nos bestiaux, et attendre que je vinsse les y rejoindre. Si, au contraire, je ne secouais le pavillon que deux fois et le plantais tout de suite à côté du corps de garde, les apparences étaient favorables, ou, du moins, ne présentaient aucun motif sérieux d’inquiétude.

Je laisse à juger avec quel battement de cœur nous débarquâmes dans l’île du Requin et nous gravîmes le rocher ! Arrivés au sommet, nous regardâmes de tous côtés autour de nous, sans rien voir d’extraordinaire. Sur les instances de Jack, je résolus alors de tirer trois coups de canon, car je commençais à croire de nouveau que mes enfants s’étaient trompés et avaient pris l’écho pour une réponse. Nous chargeâmes les trois pièces et tirâmes nos trois coups, en laissant deux minutes d’intervalle entre chaque. Nous tendîmes les oreilles, et bientôt un coup sourd se fit entendre ; après un intervalle, un second ; puis un troisième. Sept coups se succédèrent ainsi : ma joie était au comble ; Jack devenait comme un homme pris de vin. Je m’empressai de faire le signal favorable ; mais l’instant d’après, me frappant le front, je dis : « Que je suis insensé ! Je me livre à la joie sans savoir si ce sont des amis ou des ennemis que nous avons près de nous. »

Nous rechargeâmes, après cela, nos pièces, et je dis à Jack de rester auprès des canons, mèche allumée, pendant une heure, et de tirer un coup dès qu’il apercevrait soit une personne, soit un bâtiment étranger. Quant à moi, je me hâtai d’aller rejoindre ma famille à Felsheim. Malheureusement, je ne pus satisfaire la vive curiosité dont tous les cœurs étaient remplis ; mais chacun m’approuva quand j’annonçai l’intention d’aller à la découverte avec Fritz. Jenny, d’ordinaire si raisonnable, semblait avoir entièrement perdu la tête ; elle assurait que c’était son père qui avait traversé les mers pour venir à sa recherche.

Je jugeai prudent, dans cette occasion, d’imiter la con-